Compte rendu de la Soirée débat du 23 novembre 2016
Réconcilier besoin et envie d'architecture.
Le besoin d'architecture se fait de plus en plus ressentir dans des territoires qui ne traduisent plus un mode de vie mais l'organisation d'une société qui se cherche et dont les paysages sont souvent le fruit des logiques libérales, binaires et complexes, exemptes de désirs, d'aspirations à un avenir meilleur. L'envie et l'intérêt restent en retrait par rapport à l'urgence et au profit.
Les architectes, dont le travail consiste à répondre aux besoins exprimés aujourd'hui et pour les générations suivantes, ont un besoin vital d'appui et de compréhension de la part de la société entière, pas seulement des décideurs.
C'est le message que fait passer la profession lorsqu'elle se rapproche sans intermédiaire de l'utilisateur, de l'usager, de l'élu, utilisant des moyens nouveaux tels que la programmation participative, le travail collaboratif, l'économie circulaire, inventant de nouveaux usages du territoire, suscitant interêt et envie en échappant aux lourdeurs de la production du cadre bâti, le tout porté par le public et l'évidence du bon sens.
Des praticiens dans la ville
L'image entretenue de l'architecte distant, auteur - compétiteur, décideur auto satisfait et malmené par la société, cède petit à petit la place à celle du praticien utile, animateur de proximité, commentant et partageant ses prises de décision, présent et physiquement identifié dans la ville.
En intéressant le public aux pratiques du métier, en ouvrant les portes des agences, en animant des groupes participatifs, en invitant des disciplines connexes, dans des lieus à l'identité urbaine forte, les architectes ancrent la profession dans la société et apportent du sens et du lien dans les territoires.
Nouveaux champs de maîtrise
Ils cherchent par différents moyens à élargir leurs appuis, étendre leurs champs de compétence en se formant et s'informant sur les pratiques amont et aval du projet. Ils créent et investissent des nouveaux espaces d'échange et de rencontre. Ils partagent leurs expériences, lieus et outils de travail, avec leurs confrères et de nouveaux acteurs de la ville. Ils génèrent leurs propres théâtres d'intervention pour s'en assurer la maitrise et garder le contact avec l'usage.
Nouveaux schémas économiques
Les situations d'urgences et de crises successives augmentent les prises de risques. Le partage des décisions n'impliquant pas le partage des risques, un encadrement de ces nouvelles pratiques est nécessaire.
Les cadres réglementaires et législatifs dans lesquels elles évoluent ne sont plus adaptés, au point que certains architectes ne se reconnaissent plus dans le titre. Or, en réaffirmant l'usage comme le lien le plus fort entre les architectes et le public, ils rejoignent les préoccupations fondamentales de la profession.
Si le législateur a intégré dans la loi ALUR la notion d'expérimentation, dans les faits, les architectes sont souvent seuls à porter le poids de l'innovation face aux restrictions budgétaires et à l'inflation règlementaire qu'engendre l'obligation de résultats immédiats.
De nouvelles missions, des actes impliquant de nouvelles responsabilités apparaissent. Si le cadre de la profession réglementée n'évolue pas au même rythme, le risque est grand de ne pas trouver les schémas économiques viables pour les agences qui relèvent les nouveaux défis du siècle.
Une culture partagée
C'est bien au travers des cadres institutionnels que la société reconnaîtra durablement la diversité des champs d'exercice de l'architecture et c'est bien dans ces cadres que la profession organisera la solidarité et la rencontre avec le public. C'est donc aux tenants de ces nouvelles pratiques d'investir l'institution pour lui donner la plasticité nécessaire aux modifications de plus en plus rapides de nos cadres de vie.
L'architecte réaffirme son rôle social dans ces pratiques. Formé pour comprendre et organiser l'activité humaine, il doit également œuvrer à la mise en place du cadre adapté aux évolutions de son métier.
Les expériences récentes suscitent interêt et enthousiasme du public et des acteurs de la construction. Si l'envie d'architecture naît de pratiques pionnières de professionnels réactifs et attentifs aux besoins de leurs contemporains, la culture viendra des pratiques durables d'une profession organisée et portée par une société séduite et convaincue.
